Le processus de simplification des procédures judiciaires entre les États membres de l’Union Européenne et de collaboration entre les différents systèmes judiciaires nationaux est engagé depuis des années. La volonté des États membres, suivie en cela par les tribunaux, est d’alléger les procédures et de rendre les procédures impliquant plusieurs Etats, traditionnellement plus longues, coûteuses et compliquées, plus rapides et plus efficaces.

Tel est l’objectif du Règlement nº1393/2007 du 13 novembre 2007 relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale (ci-après « le Règlement »).

Le Règlement soulève toutefois des difficultés d’interprétation ; un arrêt du 11 novembre 2015 de la Cour de justice de l’Union Européenne (ci-après la « CJUE ») y apporte des réponses en précisant la notion d’ »acte extrajudiciaire ».

Dans le cas d’espèce, une société de droit allemand et une société de droit espagnol avaient conclu un contrat d’agence en novembre 2009. En mars 2012, la société allemande décide de résilier de manière unilatérale ce contrat avec effet au 31 décembre 2012. En désaccord avec cette résiliation, la société espagnole réclame alors le paiement d’une indemnité et de commissions lu restant dues, via une mise en demeure notariée.

Puis, elle demande au greffier de la juridiction espagnole compétente de notifier à la société allemande une nouvelle mise en demeure, par l’intermédiaire de l’entité judiciaire compétente en Allemagne. Cette lettre indiquait que ces sommes avaient déjà été réclamées par une précédente mise en demeure.

Sollicitée par la juridiction espagnole, l’entité judicaire allemande refuse de donner suite à cette demande, considérant qu’en l’absence de procédure en cours, le Règlement n’est pas applicable.

La juridiction espagnole a alors saisi la CJUE afin qu’elle se prononce sur la définition de l’ »acte extrajudiciaire ».

La CJUE a répondu en rappelant que la notion d’acte extrajudiciaire doit être interprétée largement et ne doit pas être limitée aux seuls actes intervenus dans le cadre d’une procédure judiciaire. Selon la CJUE, l’acte extrajudiciaire inclut, non seulement les actes établis ou certifiés par une autorité publique ou un officier ministériel, mais également les actes privés dont la transmission formelle à leur destinataire résidant à l’étranger est nécessaire à l’exercice, à la preuve ou à la sauvegarde d’un droit ou d’une prétention juridique en matière civile ou commerciale.

La Cour a également rappelé que le Règlement prévoit seulement deux circonstances dans lesquelles la signification et/ou la notification d’un acte entre États membres ne peut pas être réalisée par les moyens prévus par celui-ci :

(i) lorsque le domicile ou le lieu de séjour habituel du destinataire de cette signification et/ou notification est inconnu, et

(ii) lorsque le destinataire a nommé un représentant mandaté dans l’État où se déroule la procédure juridictionnelle.

La CJUE incite ainsi les juridictions des États membres à coopérer entre elles encore plus étroitement et rappelle que, lorsque les conditions d’application du Règlement sont réunies, il n’est pas nécessaire de vérifier, au cas par cas, que la signification ou la notification de l’acte extrajudiciaire a une incidence transfrontalière. Les conditions d’application objectives du Règlement étant réunies, les entités nationales pourront automatiquement signifier et notifier les actes extrajudiciaires.

Cette décision de la CJUE va indéniablement dans le sens d’une meilleure collaboration entre les systèmes judiciaires intercommunautaires. À l’heure où les contentieux internationaux sont de plus en plus fréquents, c’est une décision à saluer !