Au terme d’un débat mouvementé, le Parlement catalan a approuvé le 9 septembre 2020 une loi qui limite l’augmentation des loyers des baux des résidences principales dans certaines zones de Catalogne.

Cette loi a été adoptée bien que le Conseil Consultatif parlementaire ait considéré, en août dernier, que la réglementation des loyers ne faisait pas partie des compétences du Parlement catalan -puisqu’il s’agit d’une compétence de l’État- et que, par conséquent, certains articles de la loi ne sont conformes ni à la Constitution espagnole, ni au Statut, qui est le texte législatif détaillant les compétences de la région de la Catalogne.

Les baux concernés par cette loi sont uniquement ceux qui portent sur la résidence principale du locataire, et qui sont situés dans une zone déclarée « zone dont le marché résidentiel est tendu » ( ci-après ZMRT), c’est-à-dire les municipalités ou une partie de municipalités qui risquent de ne pas disposer de suffisamment de logements locatifs à un prix abordable. En revanche, les locations saisonnières, touristiques et tous les logements hors ZMRT ne rentrent pas dans le champ d’application de la loi.

La détermination des ZMRT relève de la compétence de la Generalitat (gouvernement catalan), sauf dans la municipalité de Barcelone, où la compétence revient au Conseil municipal, et dans la zone métropolitaine de Barcelone, qui dépend du Conseil métropolitain. La déclaration de ZMRT sera valable pendant 5 ans.

Le règlement établit trois critères pour l’identification des ZMRT par les autorités, qui sont les suivants :

i)       le loyer moyen a connu une croissance soutenue nettement supérieure à la moyenne en Catalogne ; ou

ii)      le coût du loyer représente plus de 30 % du revenu habituel du ménage, ou le prix moyen des loyers est supérieur à 30 % du revenu des personnes de moins de 35 ans ; ou

iii)     le loyer a augmenté au cours des 5 dernières années d’un montant cumulé de 3 points de plus que le taux annuel de l’indice des prix à la consommation de Catalogne.

À titre transitoire et pendant un an, en attendant que les administrations déterminent les ZMRT conformément aux critères exposés ci-dessus, la loi déclare 60 municipalités comme ZMRT dans lesquelles, par conséquent, elle est directement applicable (dont par exemple Barcelone et Sitges).

Dans les ZMRT, les cocontractants doivent tenir compte de deux limites dans la détermination des loyers, puisque le montant du loyer sur lesquels ils s’accordent ne pourra pas dépasser :

i)      d’une part le montant de référence pour la location d’un logement présentant des caractéristiques similaires dans la même zone ( ci-après le « Montant de Référence») ; et

ii)     d’autre part, si le logement a été loué au cours des 5 dernières années, le prix de location indiqué dans le dernier contrat de bail, actualisé en fonction de la variation subie par l’indice de garantie de compétitivité entre les dates de conclusion du contrat de bail précédent et du nouveau bail.

Le Montant de Référence du loyer est calculé conformément à l’indice de référence des loyers résidentiels publié par le département du logement de la Generalitat. Cet indice prend en compte les données de l’entité administrative auprès de laquelle sont déposés les cautions (dépôts obligatoires en Espagne) et indique le montant moyen au mètre carré des loyers résidentiels dans un endroit déterminé et pour une superficie donnée. En vertu de cette loi, le Montant de Référence est calculé conformément à l’indice susmentionné avec, exceptionnellement, une variation de 5% à la hausse ou à la baisse pour tenir compte des caractéristiques spécifiques du logement ou si des travaux ont été effectués au cours de l’année précédente. Le document détaillant le système d’indexation des prix de location devra être joint au contrat de bail, et dans l’offre de location.

Si le bailleur est un propriétaire physique ayant un revenu inférieur ou égal à 2,5 fois l’indicateur de revenu suffisant en Catalogne (IRSC) (soit environ 1.500 euros par mois) le Montant de Référence ne lui est pas applicable. Cependant, si le logement a été loué au cours des 5 dernières années, le plafond de l’encadrement des loyers décrite dans le paragraphe ii) ci-dessus, lui sera appliqué. Cette règle n’est pas applicable dans le cas où le foyer du locataire a un revenu global égal ou inférieur à 3,5 fois le IRSC (soit environ 2.000 euros par mois).

La loi prévoit que si les loyers payés dépassent ces limites, le locataire peut demander au bailleur le remboursement des loyers excédentaires versés, augmenté des intérêts légaux plus 3 points.

Ce régime d’encadrement des loyers est assoupli pour des résidences nouvelles ou qui ont fait l’objet d’une importante rénovation dans les 5 années précédentes. En outre, un moratoire de 3 ans est établi sur l’application de la loi pour ces logements, qui ne s’appliquera donc pas immédiatement.

La loi permet également aux municipalités d’établir d’autres exceptions.

De par la complexité de ses dispositions, l’application correcte de la loi requiert la connaissance par les bailleurs et locataires d’une réglementation et d’informations qui ne sont pas à la portée de tous les profils, ce qui obligera probablement les propriétaires à faire appel à des services professionnels pour louer leur logement. Par exemple, la loi fait référence à des concepts tels que la surface utile (qui ne se trouve normalement pas dans les titres de propriété, mais qui figure dans le certificat d’occupation), ou à des références telles que l’indice de garantie de compétitivité qui, bien qu’ayant été établi par des législations précédentes, n’a pas été mis en œuvre dans la pratique pour actualiser les loyers.

 

Victoria González et Antonio Marín

M&B Avocats