La loi espagnole relative aux baux commerciaux¹ (ci-après, la « LAU« ) accorde une grande liberté contractuelle aux parties qui doivent toutefois respecter impérativement les dispositions relatives au dépôt de la garantie et à la formalisation du bail².

À défaut d’accord entre les parties, leurs relations se régissent par les dispositions contenues dans la LAU relatives aux baux non résidentiels (« à usage différent de celui d’habitation ») et, de façon supplétive, par le Code civil espagnol³.

Les conséquences contractuelles liées à l’arrivée du terme du bail (soit, de sa durée initiale ou de ses périodes de prorogation), en l’absence de prévisions des parties, ne sont pas établies dans la LAU mais dans le Code civil espagnol qui instaure le principe de la tacite reconduction du contrat.

En Espagne, la tacite reconduction du bail donne lieu à un nouveau contrat et intervient lorsque le preneur reste dans les locaux pendant quinze (15) jours après l’expiration du bail avec le consentement du bailleur. Le bailleur ne doit pas avoir préalablement communiqué au preneur son intention de mettre fin au bail à sa date d’expiration.

Quant à la durée de la tacite reconduction du bail, le Code civil indique qu’elle sera annuelle si le bail prévoyait un loyer annuel, mensuelle si le loyer était mensuel, et par jours s’il était journalier.

Dans un arrêt du 26 septembre 2018, le Tribunal Suprême espagnol a statué sur la durée de la reconduction tacite du bail dans une affaire dans laquelle les parties avaient fixé dans le contrat un montant global correspondant à un loyer annuel et convenu un paiement anticipé, fractionné mensuellement.

Les parties étaient en désaccord concernant la durée de la reconduction tacite de leur contrat de bail pour déterminer le délai de préavis que le preneur devait respecter pour mettre fin au bail à sa date d’expiration, soit sans devoir verser d’indemnités au bailleur.

Les décisions des Audiences Provinciales adoptaient jusqu’à présent des critères divergents pour  déterminer la durée de la reconduction tacite du bail. Certaines fixaient cette durée en fonction du mode de paiement du loyer (fréquemment mensuel), et d’autres en fonction du caractère du loyer (i.e. mensuel, ou annuel comme dans le cas d’espèce).

Dans son arrêt, le Tribunal Suprême a tranché la question en considérant que si les parties ont convenu un loyer annuel, cela signifie que leur volonté est de fixer une durée annuelle au bail. Par conséquent, indépendamment du fait qu’elles aient prévu également un paiement mensuel du loyer, la durée de la tacite reconduction sera annuelle si les parties ont convenu contractuellement un loyer annuel pour le le bail.

Suivant ce raisonnement, si les parties fixent un loyer mensuel dans leur bail, la durée de la reconduction tacite sera mensuelle.

Enfin, il est important de rappeler que les parties ont la possibilité d’écarter l’application de la tacite reconduction du bail, ce qui est assez courant dans la pratique, mais elles devront le prévoir préalablement et expressément dans leur contrat de bail.

 

Marina Nicolas
m.nicolas@mbavocats.eu

 


¹ Les baux commerciaux en Espagne sont inclus dans la catégorie des « baux à usage différent de celui d’habitation ». Cette catégorie comprend notamment les baux à usage professionnel, c’est à dire ceux conclus pour exercer une activité industrielle, commerciale, artisanale, professionnelle, récréative, d’assistance, culturelle ou d’enseignement. Ils incluent donc également la location de bureaux;
² Articles 36 y 37 de la LAU;
³ À défaut de prévisions régionales applicables (i.e. Code civil catalan);
Article 1566 du Code civil espagnol;
Article 1581 du Code civil espagnol;
Équivalent de la Cour de Cassation en France;
Équivalent des Cours d’Appel en France.