Nous nous sommes récemment faits l’écho de l’affaire concernant la marque Rent A Car dont l’arrêt ayant annulé cette dernière a été censuré par la Cour de cassation (« L’histoire de l’arroseur arrosé : 3ème épisode » ). Rappelons que cette annulation avait fait suite à une action engagée par la société Rent A Car à l’encontre de la marque « entreprise rent-a-car » déposée par la société ENTREPRISE HOLDING, cette dernière s’étant défendue en arguant de la nullité de la marque Rent A Car.  L’arroseur, initialement arrosé, a donc retrouvé le sourire.

Par son arrêt du 8 juin 2017 intéressant la marque « Giant », la Cour suprême a là aussi cassé l’arrêt d’appel qui lui était soumis mais dans un sens défavorable à son titulaire, la société Quick France, qui elle aussi est à l’origine de ce contentieux. Elle opposait en effet sa marque « Giant » à la marque « Pizza Giant Sodebo » qu’elle estimait contrefaisante. Le titulaire de celle-ci a rétorqué en soulevant  la nullité de la marque «Giant » pour défaut de distinctivité compte tenu de la signification de sa traduction française. Cet argument n’avait pas été retenu par la Cour d’appel de Paris. Selon cette dernière, « le mot anglais « giant », par sa proximité linguistique avec son équivalent en langue française, était, à la date du dépôt de la marque, compris du consommateur francophone comme signifiant géant et, par extension, énorme ».  Poursuivant son raisonnement la Cour ajoutait que « ce terme, suggérant, d’une manière générale et impersonnelle, la dimension particulièrement importante de la portion des produits ou l’importance des services exploités sous ce signe afin de leur conférer une image positive, sans pour autant informer le consommateur sur l’une de leurs qualités ou caractéristiques déterminantes, relève de l’évocation ». La Cour en avait déduit « que la marque « Giant » apparaît comme intrinsèquement arbitraire et distinctive pour permettre au consommateur d’identifier l’origine des produits et services qu’elle désigne ».

La Cour de cassation n’a pas été convaincue par cette analyse. Revenant à une interprétation beaucoup plus littérale du terme « Giant », la Cour censure l’arrêt d’appel au motif : « Qu’en statuant ainsi, alors que sont dépourvus de caractère distinctif les signes ou dénominations pouvant servir à désigner une caractéristique des produits ou services couverts par la marque et qu’il est indifférent que les caractéristiques des produits ou services qui sont susceptibles d’être décrites soient essentielles sur le plan commercial ou accessoires, la cour d’appel a violé les textes susvisés. »

L’affaire est ainsi renvoyée devant la Cour d’appel de Paris qui ne pourra très certainement que tirer les conséquences de cet arrêt de la Cour de cassation est ainsi annulé la marque « Giant » pourtant déposée et exploitée par Quick depuis 2006. L’arroseur semble cette fois-ci bien définitivement arrosé.

Franck Berthault

M&B Avocats