La déclaration de l’état d’alerte le 13 mars dernier en Espagne et la paralysie d’une grande partie de l’activité économique ont entraîné une diminution drastique du chiffre d’affaires de nombreuses entreprises. Face à cette baisse de revenus, les entrepreneurs espagnols tentent de réduire leurs frais fixes. Outre les frais de personnel (que de nombreuses entreprises ont réduits grâce à la mise en place du chômage partiel), la location des locaux dans lesquels l’activité est exercée est l’un des éléments essentiels de ces dépenses structurelles.

En plus de représenter un coût significatif, les entrepreneurs-locataires considèrent que le fait de payer le loyer de locaux qui ne peuvent être utilisés en raison d’une interdiction légale (dans le cas des locaux commerciaux et des hôtels, fermés par décret, et dans le cas des bureaux, en raison de l’obligation légale de recourir au télétravail) n’est pas justifié.  Par conséquent, nombre d’entre eux ont demandé à leurs bailleurs des réductions ou suspensions de loyer.

Cette situation peut amener le bailleur non seulement à cesser de percevoir un revenu, mais aussi à devoir payer un impôt qu’il n’a pas perçu. En effet, l’état d’alerte n’a pas pour effet de suspendre l’exécution des obligations fiscales, et notamment celle de payer à l’Etat le montant de la TVA qui aurait dû être perçue sur le montant des loyers qui aurait dû être recouvré.

Nous résumons ci-après les situations qui peuvent se présenter, et nos conseils afin d’éviter aux propriétaires d’avoir à verser à l’Etat le montant d’une TVA qu’ils n’auraient pas perçue :

  • Comme autant le non-paiement du loyer par le locataire (par décision unilatérale de ce dernier), que le report de la date de paiement (convenu verbalement ou par écrit avec le bailleur) ne suspendent pas l’obligation de paiement de la TVA, dans ces cas, le bailleur devra payer la TVA sur le montant du loyer à l’échéance initialement prévue, même si le locataire n’en a pas effectué le règlement.

 

  • Néanmoins, le bailleur ne devra pas payer la TVA sur le montant du loyer qu’il n’a pas perçu :

1. si, d’une part, il a été convenu entre le bailleur et le locataire :

– soit une suspension du loyer (l’obligation pour le locataire de payer le loyer pendant l’état d’urgence disparaît) ;

– soit, un report de la date d’exigibilité de l’obligation de payer le loyer pour toute la durée de l’état d’urgence ;

2. et si, d’autre part, les termes de cet accord sont dûment consignés dans un accord écrit qui atteste, avec les qualifications juridiques et fiscales appropriées, de la nature et des effets dudit accord.

 

  • En cas de réduction du montant du loyer pendant une durée limitée (par exemple une durée égale à celle de l’état d’alarme), la simple renonciation du bailleur à la perception partielle du loyer initialement convenu n’aurait également aucun effet sur la TVA, à moins que cette réduction ait été convenue par écrit moyennant avenant au contrat qui modifie les conditions du bail commercial et qui permette de payer la TVA sur le nouveau montant (réduit) du loyer convenu par les parties.

 

  • En conséquence, il apparaît essentiel que la modification des conditions du contrat bail commercial soit formalisée par écrit moyennant un avenant, et que cet écrit reprenne l’ensemble des accords entre les parties et leur nature juridique, étant donné que ce qui, dans la pratique, peut paraître identique (le report du paiement ou le report de l’obligation de payer), peut légalement se traduire de deux manières distinctes, et avoir des effets diamétralement opposés (payer ou ne pas payer la TVA sur le loyer non perçu).  Pour les propriétaires, il est fondamental de disposer d’un écrit à opposer à l’administration fiscale et justifiant de l’accord auquel ils sont arrivés avec leurs locataires, dans le cas (probable) où celle-ci réclamerait au bailleur le paiement de la TVA.