Hormis les cas prévus par la loi, l’entretien préalable au licenciement disciplinaire n’était pas obligatoire en Espagne. Toutefois, sur la base de l’article 7 de l’Organisation internationale du travail (OIT), certaines cours d’appel avaient requalifié des licenciements disciplinaires comme étant sans cause réelle et sérieuse lorsque les salariés n’avaient pas été entendus préalablement à leur licenciement.

Cette interprétation n’étant pas partagée par l’ensemble des juges, il existait une insécurité juridique pour les entreprises n’ayant pas tenu d’audience préalable au licenciement disciplinaire qui risquaient de se faire condamner.

Unification de doctrine : décision du 18 novembre 2024

Par une décision du 18 novembre 2024, rendue dans le cadre d’une unification de doctrine, la Cour de cassation a tranché le débat jurisprudentiel. Celle-ci s’appuie sur l’application directe de l’article 7 de la convention nº158 de 1982 de l’OIT et défend l’obligatoriété de l’entretien préalable au licenciement disciplinaire.

Malgré l’absence de cette obligation d’entretien préalable dans le Statut des travailleurs et de la transposition explicite de l’OIT dans la législation espagnole, la Cour de cassation espagnole s’est inclinée en faveur de la protection des salariés.

L’obligation d’entretien préalable et ses modalités

Dans cette décision, la Cour de cassation confirme que l’employeur est tenu de permettre au salarié de se défendre contre les accusations portées à son encontre avant de procéder au licenciement disciplinaire.

Toutefois, cette décision suscite encore des doutes : rien n’est indiqué sur la forme de cet entretien ni sur le délai octroyé au salarié pour se défendre.

Un nouveau prérequis uniquement exigé pour les licenciements postérieurs à cette décision

Toutefois, elle précise que cette exigence ne s’appliquera qu’aux licenciements prononcés après la publication de cette décision, les entreprises n’étant pas en mesure de prévoir un tel revirement jurisprudentiel. Les licenciements disciplinaires intervenus avant la publication de cette décision ne sont donc pas soumis à cette nouvelle obligation.

Une procédure favorable au salarié mais qui présente des risques de détournement stratégique

Ce nouveau prérequis avantage d’autant plus le salarié qu’il sera avisé de la volonté de l’entreprise de procéder à son licenciement. Cela pourrait ainsi l’inciter à se mettre volontairement en arrêt maladie, rendant ainsi le licenciement envisagé nul. Ce revirement de jurisprudence majeur pourrait susciter des nouvelles stratégies juridiques à l’avenir.

Celia Juega et Lydia Lacroix Alvarez