En principe, toute résiliation du contrat d’agent donne droit à l’agent, au versement d’une indemnité compensatrice de rupture qui a vocation à réparer le préjudice subi du fait de la perte de part de marché qu’il s’était attachée. C’est même le cas lorsque la rupture est due suite au décès de l’agent, auquel cas ses ayants cause ont droit à l’indemnité ou encore lorsque, du fait de son état de santé, la continuité du contrat ne peut plus être raisonnablement envisagée.

Par exception, cette indemnité n’est pas due lorsque la rupture est à l’initiative de l’agent commercial ou lorsqu’elle est provoquée par une faute grave de l’agent.

De plus, il est admis que lorsque le mandant modifie unilatéralement le contrat d’agent, il provoque la résiliation du contrat et ouvre de son fait, un droit à l’indemnité compensatrice au profit de l’agent.

Toutefois, dans l’arrêt du 5 octobre 2022¹ (décision disponible ici), la chambre commerciale de la Cour de cassation a précisé qu’une clause d’un contrat d’agent peut parfaitement organiser la révision unilatérale du périmètre de la clientèle de l’agent sans pour autant entraîner la résiliation du contrat. Cette clause est valable dès lors qu’elle prévoit le versement d’une indemnité forfaitaire à l’agent commercial et ne dissimule pas une clause de résiliation du contrat.

En somme, pour que cette clause faisant évoluer le portefeuille de clientèle de l’agent soit valable, le mandant, outre le paiement d’une indemnité forfaitaire, ne doit pas avoir l’intention de mettre un terme au contrat.

En l’espèce, une clause du contrat d’agent prévoyait la possibilité pour le mandant de reprendre un client du portefeuille géré par l’agent moyennant son remplacement par un ou plusieurs clients apportant un chiffre d’affaires équivalent. Si ce remplacement se révélait impossible, la même clause prévoyait le versement d’une indemnité destinée à compenser la perte potentielle de rémunération subie par l’agent du fait de la modification de son secteur. Cette indemnité était estimée à un montant forfaitaire égal à 12 mois de commissions versées au titre des contrats sur le ou les clients concernés par la modification, lesquelles étant calculées sur la base de la moyenne des 12 ou 24 derniers mois, suivant si le client concerné avait plus ou moins de 2 ans d’ancienneté. Cette clause a donc été reconnue valable par la Cour de cassation qui a débouté l’agent commercial de sa demande en nullité au visa de l’article L. 134-12 du Code de commerce.

Conclusion : cet arrêt est important et son impact sera très positif à nos yeux. Il offre une plus grande flexibilité aux mandants pour faire évoluer le portefeuille de l’agent commercial, dans le respect des droits des parties et permet l’adaptation du contrat au cas par cas alors que jusqu’à maintenant, un changement unilatéral du contrat emportait fatalement son anéantissement.

M&B Avocats

 


¹ Cass. com. 5 octobre 2022, n°20-16.665, F-D