Peu d’entre nous connaissent l’apostille avant d’avoir à réaliser des démarches administratives et/ou juridiques dans un pays étranger. En effet, ce terme, qui sonne joliment, renvoie à un sceau apposé sur des documents officiels par des autorités nationales et garantit l’authenticité auprès des autorités des autres pays signataires de la Convention instaurant l’apostille (« Convention de La Haye »). Une fois un pied posé en Espagne, il y a de grandes chances pour que tout.e un.e chacun.e ait à se familiariser avec l’apostille, compte tenu de l’appétence de notre voisin ibérique pour le formalisme administratif.
Dans le cadre de la constitution de filiales ou d’acquisitions immobilières en Espagne, ou encore d’opérations d’acquisitions de sociétés espagnoles, par des sociétés françaises, l’apostille est requise. En effet, ces dernières doivent apporter leurs extraits K-bis apostillés au notaire espagnol. En amont de ces opérations, ce document apostillé, accompagné d’une traduction assermentée vers l’espagnol, est nécessaire pour obtenir leur numéro d’identification fiscale espagnol ¹ (ou « NIF »).
Concernant les particuliers, le notaire espagnol est susceptible de demander, dans le cadre d’une déclaration de succession de biens en Espagne², que les actes notariés signés par les héritiers en France soient apostillés (par exemple, l’acte de notoriété successoral, les procurations pour déléguer ces démarches en Espagne, etc.).
Actuellement, en France, le seul organisme compétent pour apostiller les actes publics français³ (dont les extraits K-bis, les actes notariés, etc.) est le parquet général de la Cour d’appel du lieu où le signataire de l’acte ou l’autorité ayant apposé une mention d’enregistrement ou de certification compétente a son siège.
Toutefois, à partir du 1er septembre 2023⁴, le système de légalisation et d’apostille des actes publics français devrait être simplifié avec, nous l’espérons, un allègement des formalités et un raccourcissement des délais de traitement.
En effet, les principales nouveautés de la réforme des modalités de délivrance de la légalisation⁵ et de l’apostille sont les suivantes :
- Nouvelle autorité compétente : les notaires auront la compétence pour légaliser et apostiller les actes publics établis par les autorités françaises ;
- Recours à une procédure dématérialisée: une base de données nationale des signatures publiques sera créée en janvier 2023 qui permettra de centraliser les informations nécessaires au traitement des documents à légaliser ou à apostiller, ainsi que les modalités de dépôt requises ;
- Réduction des délais de traitement par voie électronique : les autorités compétentes, c’est-à-dire le parquet général de chaque cour d’appel mais aussi, et de façon nouvelle, les notaires, devront délivrer la légalisation ou l’apostille sous un délai de trois (3) jours ouvrés à compter du jour où les informations nécessaires au traitement du document auront été déposées dans la base de données des signatures publiques ;
- Délivrance des documents par voie électronique : les légalisations et apostilles seront délivrées par voie électronique dès lors que les autorités compétentes susmentionnées, disposeront des moyens techniques nécessaires à cet effet, à défaut de quoi, ces dernières délivreront les documents légalisés ou apostillés en support papier ;
- Création d’un registre des légalisations et apostilles: pour assurer un suivi électronique desdites procédures, un registre des légalisations et apostilles sera tenu par le Conseil supérieur du notariat dans lequel sera enregistré l’ensemble des légalisations et apostilles délivrées sous forme électronique.
À l’ère du digital, et dans un contexte où les échanges transfrontaliers se multiplient, nous ne pouvons que saluer une telle modernisation et facilitation des démarches de légalisation et d’apostille des documents. Nous approuvons cette réforme et nous espérons que sa mise en place sera rapide.
Clara Franco et Marina Nicolas
M&B Avocats
¹ Numéro obligatoire délivré aux personnes physiques ou morales étrangères qui souhaitent opérer en Espagne permettant de les identifier auprès du Trésor Public espagnol (« Agencia Tributaria ») ;
² Voir article « Hériter un bien immobilier en Espagne : formalités à prévoir… en Espagne ! » ;
³ C’est-à-dire : (i) les actes émanant des juridictions administratives ou judiciaires, des ministères publics institués auprès de ces dernières et de leurs greffes ; (ii) les actes établis par les huissiers de justice ; (iii) les actes de l’état civil établis par les officiers de l’état civil ; (iv) les actes établis par les autorités administratives ; (v) les actes notariés ; (vi) les déclarations officielles telles que les mentions d’enregistrement, les visas pour date certaine et les certifications de signatures, apposées sur un acte sous seing privé et, (vii) les actes établis par les agents diplomatiques et consulaires ;
⁴ Date d’entrée en vigueur du décret nº2021-1205 du 17 septembre 2021 publié au Journal Officiel le 19 septembre 2021 et pris en application de l’ordonnance nº 2020 du 4 mars portant réforme des modalités de délivrance de la légalisation et de l’apostille ;
⁵ La « légalisation » est la formalité par laquelle une autorité publique certifie avoir vérifié l’identité du signataire d’un acte et affirme que la signature apposée sur ce même acte est celle de l’intéressé qui a comparu en personne.