Comme nous l’avions évoqué dans ces colonnes, la Cour de justice de l’Union européenne a été amenée à clarifier le statut d’agent commercial et plus particulièrement à répondre à une question préjudicielle qui l’interrogeait sur le fait de savoir si un agent, qui ne dispose pas du pouvoir de négocier les prix et les conditions contractuelles des contrats de vente ou de services de son commettant, pouvait bénéficier dudit statut (cf article précédemment publié sur notre blog : « Le statut de l’agent commercial bientôt clarifié et certainement renforcé par la Cour de justice de l’Union Européenne »). La Cour de justice a répondu par un arrêt du 4 juin 2020 dans des termes ne souffrant d’aucune ambiguïté : « Une personne ne doit pas nécessairement disposer de la faculté de modifier les prix des marchandises dont elle assure la vente pour le compte du commettant pour être qualifiée d’agent commercial ».
Cet arrêt de la Cour de justice est essentiel. Il met fin au flou et à l’insécurité juridique entretenus par la jurisprudence en la matière depuis plus de 20 ans. En effet, certaines juridictions, et notamment la Cour d’appel de Paris dont les décisions étaient approuvées par la Cour de cassation, adoptaient une solution inverse, refusant la qualification d’agent commercial en l’absence de pouvoir de modifier les prix ou les conditions de vente. Cette solution était critiquée par une grande partie de la doctrine. Elle n’était d’ailleurs pas unanime et certaines juridictions du fond refusaient cette définition restrictive du statut d’agent commercial.
Aujourd’hui le débat est donc clos et la solution de la Cour de justice renforce clairement le statut protecteur dont bénéficie l’agent commercial. Rappelons en effet que ce dernier a droit à une indemnité en fin de contrat. Limiter le bénéficie du statut et donc le droit à indemnité aux seuls agents disposant de la faculté de modifier les prix et les conditions des contrats de leurs mandants excluait ainsi un grand nombre d’agents. Il est en effet fréquent que les agents ne disposent pas d’un tel pouvoir.
La Cour de cassation n’a pas tardé à se plier à cette solution et elle l’a fait par un arrêt du 2 décembre 2020 : « Doit désormais être qualifié d’agent commercial le mandataire, personne physique ou morale qui, à titre de profession indépendante, sans être lié par un contrat de louage de services, est chargé, de façon permanente, de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats de vente, d’achat, de location ou de prestation de services au nom et pour le compte de producteurs, d’industriels, de commerçants ou d’autres agents commerciaux, quoiqu’il ne dispose pas du pouvoir de modifier les prix de ces produits ou services. »
Les termes de cet attendu et sa publication au bulletin attestent de son caractère novateur.
Cette clarification doit être saluée.
Franck Berthault
avocat associé
M&B Avocats